Notre ami, notre camarade Jihel est mort subitement lundi 24 avril.
Jihel était un pilier de la chorale des Sans Nom, des rencontres de chorales révolutionnaires de Royère, du journal RésisteR!…
Jihel était un militant. Il a mis ses talents de maquettiste, de ouèbemasteur, de concepteur d'affiches et d'organisateur au service de son idéal de fraternité et de justice. Il a rendu possible un tas d’événements militants, avec Solidaires et avec d'autres.
Il luttait contre la maladie depuis plusieurs mois, mais la maladie l’a emporté.
"Ceux qui se sont sagement limités à ce qui leur paraissait possible n'ont jamais avancé d'un seul pas" (Michel Bakounine)
Jihel est arrivé à la chorale des Sans Nom en 2011. Sur la pointe des pieds et caméra au poing. Très vite il a compris que la chorale était faite pour lui, et qu’il était fait pour elle. Jihel a surtout marqué la chorale en y réussissant un exploit hors norme. Il nous a fait passer du minitel aux réseaux sociaux en moins de temps qu’il n’en faut à un gouvernement socialiste pour trahir ses électeurs... Avant Jihel le site Internet de la chorale était jaune pisseux et écrit en times new roman police 8. Si les textes entièrement en italique étaient justifiés, c’était uniquement du point de vue politique. Depuis Jihel, le site de la chorale est rutilant : rouge et noir comme il se doit, plein de photos de vidéos, de textes et de notes. Ça clignote de partout ça brille, vraiment ça le fait !!! Avant Jihel on s’échangeait des morceaux papiers chiffonnés et griffonnés pour apprendre les chansons. Depuis Jihel, tout est numérisé, et le site de la chorale des Sans Nom est devenu une référence pour les chants de luttes en France et même en Europe. Pour tout dire, avant Jihel on pensait que la révolution ne s’embarrasse pas d’informatique, qu’un bon pavé dans la vitrine du Medef ou de la Cfdt suffit, maintenant on sait que la révolution se fait aussi sur internet. Bon certes ça ne marche guère mieux... mais on va y arriver !!! On pensait aussi que les informaticiens étaient des gens qui parlent peu et surtout qui parlent une langue étrange à base d’anglais mal prononcé et d’onomatopées gutturales, des gens qui, bien loin des réalités quotidiennes, mangent des chips devant leurs écrans monocolores. On sait maintenant qu’il en est des informaticiens comme des autres : il y en a de toutes sortes. Mais disons-le, même quand ils sont ouverts aux soucis, ras du tapis, des handicapés de la souris, même quand ils sont soucieux des autres comme l’était Jihel, ils passent trop temps sur leurs sacrés engins qui nous privent de leur présence. C’est comme ça, en chantant, en tapotant sur son clavier, en polémiquant avec la mauvaise foi qui fait les vrais militants que Jean-Luc est devenu en un rien de temps un choriste précieux, indispensable. C’est comme ça qu’il s’est fondu dans cette masse bruyante et indisciplinée qu’est la chorale, et aussi dans cette encore plus grosse masse encore plus indisciplinée qu’est l’assemblée des chorales révolutionnaires qui se réunissent chaque année à Royère dans la Creuse, ordinairement au mois d’août. Tiens ! Pour une fois elles sont à l’unisson et leurs chants de tristesse s’accordent au nôtre. Et de Londres à Parme en passant par Madrid, et Saint-Etienne, tu as recréé encore une fois, Jihel, l’internationale que nous avons fêté ensemble à Nancy en 2014. La fête était belle et ta part dans cette réussite n’était pas mince. Grognon, parfois grincheux, comme le sont celles et ceux qui finiront par changer le monde à force d’essayer, Jihel a toujours eu au coin des yeux une étincelle qui hésitait entre la tristesse et le sourire. Surement que comme beaucoup d’entre nous il a toujours balancé entre rire et pleurer au spectacle du monde. Nous autres choristes, on t’a vu te battre contre la maladie avec acharnement, avec courage, avec des doutes parfois, mais sans jamais baisser la tête. On y a cru avec toi l’année dernière quand on t’a vu revenir chanter, rire et t’engueuler avec nous. Et puis la mort nous a surpris, comme elle t’a saisi traitreusement lundi dernier. Jihel, notre ami, notre compagnon, notre camarade, tu t’en vas en nous laissant au chœur une blessure profonde. Ou plutôt, ton départ agrandit cette plaie béante que nous ont laissée Jean-Michel, Cathy, Monmon, et notre petite Sarah. Mais tout en malice, tu avais fait promettre à quelques-uns d’entre nous que si ce putain de jour arrivait, tu rirais bien de là où tu es, à nous voir chanter la Makhnovchina. Cette chanson, que certains qualifient d’apocryphe avec raison, et que d’autres vénèrent avec passion, toi tu aimais simplement cette chanson qui, sur air de chant de l’armée rouge, chante les exploits de l’armée anarchiste qui en Ukraine a résisté voilà bientôt un siècle aux armées rouges et blanches. C’est promis on la chantera tout à l’heure à la MJC avec toi pour toi, et tu verras que blottis les uns contre les autres, nous ferons entendre des éclats de rire et de larmes qui sont plus forts que la mort. ¡Hasta la victoria compañero!
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